Macbeth : Ce qu'un homme ose, je l'ose ! Viens à moi / Sous l'apparence de l'ours russe le plus farouche, / Du rhinocéros le plus hérissé, du tigre / Le plus féroce de l'Hyrcanie. Prends toute forme / Sauf celle-ci, et mes nerfs assurés ne trembleront pas. / Ou encore : revis, et défie-moi / Au combat à l'épée jusque sur la lande déserte / Et si je reste ici à trembler de peur, tu pourras me dire / Une poule mouillée.
Va-t'en, va-t'en, / Horrible spectre, image sans substance ! (Acte III, scène IV)
Ample fresque historique embrassant mythologie et monde contemporain, Fille d'Amanitore dépeint l'articulation de la beauté et la brutalité propre au monde des humains, au travers de récits de vie de femmes d'aujourd'hui, filles et mères, en des mondes où se mêlent demeure ancestrale des divinités, terre des humains et le no man's land d'Amanitore, la candace à la mémoire oubliée. Léonora Miano invite à repenser le fondement divin du désir, réinterroge la puissance de la filiation féminine, et le poids des non-dits dans la transmission mère-fille. Et que mon règne arrive est une exhortation à la reconquête de leurs mémoires et leur par des femmes subsahariennes, pour les affranchir du discours bien-pensant de la « sororité planétaire », autre leurre du féminisme européocentré. Dans cette proposition pour affranchir la femme subsaharienne de toute forme de domination, coloniale et masculine, Léonora Miano l'inviter à habiter ses spiritualités, et orchestre le règne du féminin dans le monde par la voie africaine.
Philippe et Vincent ferment leur vidéoclub, après vingt- sept ans passés au milieu des films. Une bobine teintée de nostalgie et de passion. C'était avant Netflix, avant Amazon, avant le streaming. C'étaient eux, les Mohicans : un veuf, un divorcé, engloutis sous les VHS et les DVD. Ils décident de partir vivre à la campagne. Pour renommer le monde, échapper au temps, se réinventer, entre souvenirs tenaces et espoirs inouïs. Une maison hantée dans le Vercors, où le fantôme d'Orson Welles n'est jamais loin. Dotés d'un humour à toute épreuve, ces cinéphiles invétérés cultivent leur jardin, jusqu'au matin de l'horreur... Hommage sensible au cinéma, entre lancinement tragique et salves comiques, Lazzi évoque un monde en liquidation, en attente d'un futur sensé.
Dans le commissariat central de Milan, un « Fou » donne du fil à retordre à un agent de Police et au Commissaire Bertozzo : ils se livrent à un interrogatoire que le « Fou » démonte peu à peu, les déstabilisant et dévoilant peu à peu toutes les facettes de sa personnalité et de ses déguisements (juge à la Cour de cassation, capitaine de police puis évêque) pour faire éclater la vérité au grand jour. « Voyez mon dossier médical ; j'ai déjà été interné seize fois... et toujours pour la même raison : j'ai la manie des personnages. Cela s'appelle « histrionomanie », du latin istriones qui veut dire acteur. En fait, mon hobby, c'est de jouer sans cesse des rôles différents. » Avec un aplomb déconcertant, celui-ci se livre à une contre-enquête menée avec brio et un sens inné de la démesure sur le massacre d'état perpétré à l'encontre du cheminot anarchiste, Guiseppe Pinelli, précipité depuis la fenêtre du 4e étage de ce même commissariat, tandis que l'enquête officielle avait conclu à un suicide. Une affaire qui fit scandale en Italie et en Europe, mettant à jour les méthodes illicites utilisées pour forcer les aveux lors des interrogatoires. Une farce politique subversive qui s'illustre par la démesure de la supercherie mise en scène, la bêtise et l'impunité des puissants, la duplicité de la justice, et l'équilibre toujours fragile de la vérité.
Satire politique sur la corruption de la justice, écrite en 1970, Mort accidentelle d'un anarchiste est un hommage brûlant et plein d'esprit à la quête de la vérité et au rétablissement d'une mémoire bafouée.
Qui aime aller chez le dentiste ? Sans pathos, avec un humour mordant, le narrateur se souvient des séances trop fréquentes après-guerre chez le Dr Spodek. Mais à douleur, douleur et demie, le dentiste et sa femme vivaient une tragédie personnelle autrement plus pénible : comment faire le deuil de leurs deux filles ? Suivi de «Votre Maman» augmenté d'une scène inédite.
Écrit en 1959, ce grand classique du répertoire noir américain emprunte son titre à un poème de Langston Hughes, figure majeure de la Harlem Renaissance.
Un raisin au soleil est un texte essentiel pour comprendre la ségrégation raciale et sociale aux États-Unis, et les formes de résistance possibles.
Ce drame raconte la vie d'une famille du quartier noir de Chicago dans les années cinquante, qui rêve d'ailleurs dans un appartement usé par le temps.
Un chèque de pension de 10 000 $ vient semer la zizanie et divise la famille Younger. Que faire quand soudain tout devient possible ? Lena dite « Mama » décide d'honorer la vie de labeur de son défunt mari et achète une nouvelle maison pour sortir la famille de son taudis, décidant d'épargner le reste pour les études de médecine de sa fille. C'était sans compter sur le désespoir de Walter Lee, son fils, prêt à tout pour donner un sens à sa misérable vie, et la pression exercée par l'association de voisinage pour les faire renoncer à s'installer dans leur nouvelle maison, située dans un quartier blanc de Chicago, illustrant la pratique discriminatoire du redlining. Faut-il tenir tête à un monde hostile ou accepter la place qui nous est assignée ?
Dans cette adaptation de la nouvelle fantastique «Le Moine noir» d'Anton Tchekhov, Kirill Serebrennikov s'interroge sur le désir humain et irrépressible de liberté, sur l'art, le génie et l'autodestruction à laquelle ces tentations peuvent mener.
La pièce se déroule au mois de mars 1759 à la frontière entre Norfolk et Suffolk, en pleine Angleterre rurale. Alors que le pays attend la comète de Halley, Sally Poppy, 21 ans, est condamnée à être pendue pour un meurtre affreux. Lorsqu'elle prétend être enceinte, 12 matrones sont dessaisies de leurs tâches ménagères pour former un jury populaire qui décidera de sa vie. La prévenue dit-elle la vérité ou essaie-t-elle simplement d'échapper à la potence en amadouant le jury ? Avec la sage-femme Lizzy Luke prête à défendre la jeune fille, et une foule qui réclame du sang à l'extérieur, les matrones se livrent à un combat juridique acharnée, où le diable n'est jamais loin...
Cette pièce vient clore la trilogie des « Points de non-retour » débutée avec [Thiaroye] en 2018, suivie de [Quais de Scène] en 2019, formant ainsi une grande fresque historique aux récits intimes enchâssés. Poursuivant son exploration des récits manquants de l'histoire postcoloniale française, Alexandra Badea s'attache ici à un épisode lui aussi largement méconnu : les « enfants de la Creuse ». Le transfert d'enfants réunionnais organisé par les autorités françaises, dans le but de repeupler certains départements victimes de l'exode rural dans les années 1960 et 1970. Qui sont ces enfants déracinés, qui peuplaient les foyers de la DDAS dans les années 1980 ? D'autres récits d'abandons viennent s'y articuler, posant la question de la responsabilité de l'État dans cette vaste entreprise de déportation.
Dans un foyer abandonné, envahi par la végétation, Nora (figure récurrente des autres volets de la trilogie) réalise un documentaire sur les « enfants de la Creuse » pour saisir des traces de sa mémoire familiale. Elle rencontre trois anciens pupilles qui, trente ans auparavant, ont séjourné dans ce foyer, aujourd'hui dévasté par le temps.
S'articulent ainsi mémoire familiale, générations sacrifiées et pages effacées de l'histoire contemporaine, mettant à jour les interférences politiques dans un espace intime anéanti.
Anissa, 25 ans, décide de retrouver la trace d'un père qu'elle n'a jamais connu. «Au non du père» interroge ce qui fait lien entre un parent (biologique et d'éducation) et son enfant et comment cela oriente un parcours de vie.
Huit heures ne font pas un jour forme ce que l'on appelle aujourd'hui une « mini-série » en cinq épisodes, diffusée à la télévision allemande d'octobre 1972 à mars 1973, et trois épisodes supplémentaires non réalisés. Cette minisérie décrit la vie quotidienne d'une famille de la classe ouvrière en Allemagne de l'Ouest, entre utopie prolétaire post-« 30 Glorieuses » et fresque sociale reflétant l'anticonformisme culturel des années 1970.
Sans naturalisme feint ni goût prononcé pour la caricature sociale, Fassbinder y aborde les mécanismes d'oppression, l'aliénation par le travail à l'usine, lieu d'exercice de l'autorité des contremaîtres et des patrons, le désir d'émancipation par le travail chez les femmes, l'opportunisme insidieux de la presse, l'essor du consumérisme avec l'ouverture de l'Allemagne de l'Ouest au libéralisme occidental, ou des sujets plus tabous comme le désir amoureux des personnages âgées.
Loin du documentaire social, c'est une démarche fictionnelle que privilégie Fassbinder, qui joue de manière délicieusement subversive avec les codes de la représentation télévisuelle. Dans une démarche totalement novatrice et visionnaire, comparable à celle des romanciers réalistes du 19e siècle, le réalisateur s'attache ici à la représentation d'un monde social, le milieu du prolétariat ouvrier, qui n'était traditionnellement pas « montré » dans les fictions télévisées.
De quoi s'agit-il ? D'un François Ier libertin et jouisseur, oublieux de ses devoirs, séduisant toutes les femmes, les violant même parfois, et de son valet, Triboulet, un fou méchant à la cour et mélancolique en privé, un père exclusif et jaloux d'une fille encore vierge.
De cette pièce, Verdi a tiré un de ses chefs-d'oeuvre, Rigoletto.
Selon Alfred de Vigny, Chatterton aurait été composé en dix-sept nuits, sous le signe du silence et de l'ascèse, dans les affres d'une création vouée à un dessein élevé : mettre en scène un poète maudit afin que le public s'émeuve du sort des artistes pauvres. Pour y parvenir, Vigny s'inspire de la brève existence du poète Thomas Chatterton, qui s'est donné la mort à la veille de ses dix-huit ans, après avoir souffert de l'humiliation et de la faim. À partir de l'exemple d'un seul, le dramaturge entend toucher le coeur de tous.
Certains ont lu dans Chatterton une apologie du suicide, d'autres une pièce étrange car sans action. Ce « drame de la pensée » a toutefois remporté un triomphe à sa création, en 1835, et nombreux furent ceux qui se reconnurent en Chatterton.
Richard II (1595) est un conte d'hiver aux accents plus tristes que violents, sans batailles, dans une atmosphère de soleil couchant. Le roi est une figure mystérieuse et tragique, autant victime de lui-même que de Bolingbroke, son cousin usurpateur : «Je donnerai [...] mon vaste royaume pour une petite tombe.» Devenu poète, il aura le ciel pour domaine. Le soleil qui se couche, le finale d'une musique, Comme l'arrière-goût d'une saveur douce, ont une douceur qui dure, Se gravent plus dans la mémoire que des choses longtemps révolues. (Acte II, scène 1)
Ces pièces de Lars Norén dont l'écriture s'étend de 1980 au début des années 2000 dressent une peinture tragique et sensible de son univers théâtral, où une violence inouïe investit le réel. Elle s'introduit dans les relations intimes, dans les espaces mentaux des personnages irrépressiblement vivants, en dépit de leur désir de mort. Xénophobie, parricide, meurtres, violence conjugale, huis clos familiaux insoutenables. Pas de psychologie mais une prise directe avec l'inconscient, et une fragilité psychique qui se livre sans fard.
Les personnages de ces tragédies contemporaines semblent des exilés du présent, des âmes errantes, en quête d'une rive où accoster pour survivre.
Un cimetière à la fin de l'automne. Un homme et une femme se croisent sur un banc. On devine une relation amoureuse passée - ou à venir ? Autour d'eux tout le monde s'affaire, s'agite, le temps semble s'accélérer, toujours en suspens. Que s'est-il passé ? Des fantômes ou flottements de présences nichés dans les souvenirs, qui évoquent ces « voix des limbes » dont parlait Jacques Lassalle.
Au centre de Et la nuit chante, un couple : lui passe son temps à lire, allongé sur un canapé et voit passer sa carrière d'écrivain qui s'effiloche ; elle désire une autre vie et cherche à s'évader de cette médiocrité du quotidien. Ils ont un bébé et les parents du jeune homme viennent voir leur petit-fils, mais disparaissent aussitôt arrivés. Une nuit, alors qu'elle est sortie en ville, le jeune homme regarde par la fenêtre et attend son retour. L'aurait-elle quitté pour de bon ? La pièce a été adaptée à l'écran par Romuald Karmakar en 2004
La Ville a` voile est un songe : celui de Josty, qui a quitte´ Anvers pour faire fortune a` l'autre bout du monde et y revient quarante ans apre`s, riche et malade. Un autre songe tient en e´veil les hommes re´unis a` bord du fameux Findor : le plaisir qu'ils ont connu a` La Vita Breve, dans les bras d'une ce´le`bre odalisque assassine´e neuf ans plus to^t. Ces personnages hante´s par leur passe´ s'efforcent de le ressusciter a` l'aide de simulacres avant de de´couvrir que le de´sir s'e´teint dans la possession et que le re^ve se brise au contact du re´el.
La Ville à voile est suivi de La Vita Breve.
Tendre et doux souvent, âpre et violent parfois, l'amour maternel est une force qui peut tout emporter sur son passage. À travers les neuf nouvelles de ce recueil, les auteurs explorent différentes facettes de ce sentiment et dressent des portraits de mères, entre rires et larmes.
Décor : une cellule de prison. Personnages : le surveillant et trois détenus : Yeux-Verts, vingt-deux ans, condamné à mort ; Maurice, dix-sept ans, qui lui voue une admiration sans bornes ; Lefranc, voleur de vingt-trois ans, dévoré par la jalousie. Dans ce huis clos, tout est drame : un lit défait, un mot de trop. Mais la tragédie naît d'une femme absente, celle que Yeux-Verts va laisser en mourant sur l'échafaud. Maurice et Lefranc la convoitent, se la disputent sous le regard de Yeux-Verts. Jusqu'au meurtre : Lefranc étrangle Maurice. «J'ai fait ce que j'ai pu pour l'amour du malheur, dit-il. Je suis vraiment tout seul.»Cette pièce en un acte a été créée au Théâtre des Mathurins le 26 février 1949.
Sygne de Coûfontaine doit épouser le préfet Turelure pour obtenir la libération du Pape, détenu en otage. En 1814, le roi est restauré, Georges, le cousin de Sygne, vient tuer Turelure, Sygne s'interpose et meurt. Turelure est nommé comte par le roi. Loin de se restreindre au temps précis de la Révolution et de l'Empire, L'Otage est l'illustration d'un débat universel, actuel et virulent à toutes les époques. Le conflit du Pape et de l'Empereur, la rivalité du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel, « l'Otage divin que les passions humaines essayent de s'arracher et de se partager », écrivait Claudel, est une situation qui s'est plusieurs fois présentée dans l'Histoire.
(drame en trois actes).
Les Géants de la montagne : Anna, Bieda, Ruslana, Solia et Zo vivent retirées du monde, dans une villa perchée sur la montagne où elles se sont créé un monde à elle, régi par leur imaginaire. Un soir surgit une troupe de théâtre ayant perdu succès et fortune, soudée autour d'une comédienne-comtesse qui s'obstine à vouloir jouer l'oeuvre testamentaire d'un poète qui l'a aimée. Au fur et à mesure de la nuit, les personnages sont visités par des souvenirs douloureux qui assaillent leurs sens. La villa attire les esprits passés et ravive chez les acteurs des personnages interprétés. Plus haut dans la montagne vivent ceux que l'on appelle les « géants », qui vouent un culte à la force physique au mépris de l'art et de la poésie, et devant lesquels ils décident malgré tout d'interpréter leur pièce. La création des Géants de la montagne a eu lieu le 10 janvier 2023 au TNBA (Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine) dans une mise en scène de Lucie Berelowitsch avec Jonathan Genet, Marina Keltchewsky, Thibault Lacroix, Baptiste Mayoraz, Roman Yasinovskyi et les Dakh Daughters.
Danse macabre : Par la voix du groupe de musiciennes ukrainiennes les Dakh Daughters, Danse macabre témoigne des conséquences dramatiques de la guerre en Ukraine. Ces souvenirs polyphoniques disent l'horreur, la violence et la douleur intime. Le spectacle est une performance conçue dans l'urgence comme un témoignage et un acte de résistance. La création de Danse macabre a eu lieu le 16 juin 2022 à l'Odéon - Théâtre de l'Europe (Ateliers Berthier) dans une mise en scène de Vlad Troitskyi avec les Dakh Daughters.
Retour : Apprenant la maladie de sa femme, un homme revient dix ans après l'avoir brusquement quittée. Il lui offre un pingouin empaillé, souvenir de leur première rencontre. À mesure que la santé de la souffrante se dégrade, les liens qui unissent cette famille se redéfinissent autour de ce mystérieux cadeau pour lequel tout le monde semble vouer un étrange attachement. La création de Retour a eu lieu le 9 décembre 2023 au Geyser de Bellerive sur Allier dans une mise en scène de Vincent Goethals avec Solo Gomez, Bruno Bonjean et Juliette Chmielarz.
L'Homme à l'oreille tendue : Suite à un licenciement, un homme décide de prendre la route. Son itinéraire le mène progressivement vers un retour à la nature. Le passé se mêle au présent et la voix intérieure de l'homme résonne dans les paysages qu'il traverse. Alors qu'il poursuit sa traversée, il fait la rencontre d'un chien. L'animal, qui chasse la solitude de l'homme, permet bientôt de faire la lumière sur l'existence qu'il mène...
Léna, ancienne danseuse de l'Opéra, vit seule depuis la mort de Maurice, son mari, célèbre auteur et compositeur de music-hall. Elle reçoit les visites d'un journaliste qui souhaite écrire une biographie de son époux, mais aussi celles de son fils Paul. Elle se remémore alors sa vie et sa carrière de danseuse étoile, éclipsée par la réussite de son mari. Bientôt pourtant, Léna s'égare entre ses souvenirs confus et ses désirs inaccomplis... La création de Une étoile a eu lieu le 9 février 2023 au Théâtre Montparnasse dans une mise en scène de Stefan Druet Toukaïeff avec Macha Méril, Marc Citti, Laurent d'Olce et Claire Magnin.